journal Debates Perception and application of French law as a paradigm in 19

Stefano Solimano

Bonaparte et les îles Ioniennes. Francisation juridique en difficulté. Notes pour un approfondissement

Sommaire:

1. Prologue
2. La francisation des îles Ioniennes au cours de la première occupation
3. La réforme de la législation durant la République des Sept-Iles - Examen sommaire
4. Droit et politique dans l’Heptanèse et à Corfou à l’époque napoléonienne
5.
Epilogue



1. Prologue.

«Les îles de Corfou, de Zante et de Céphalonie sont plus intéressantes pour nous que toute l’Italie ensemble1 (…) elles nous rendent maîtres de l’Adriatique et du Levant»2.

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C’est ainsi que s’exprimait le général Bonaparte en 1797 au sujet des îles de la mer Ionienne qu’il conquerrait et dominerait à deux reprises 3.

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Nous allons chercher à comprendre quelle a été l’attitude des Français en ce qui concerne la politique du droit dans le Levant4. Assiste-t-on à une francisation ‘musclée’ de la législation? Le phénomène qu’Adriano Cavanna n’a pas hésité à qualifier d’impérialisme juridique pour définir la politique du droit napoléonien dans le Royaume italique se concrétise-t-il5? On pourrait objecter que la présence française dans le Levant n’a pas été de longue durée, si on la compare à la présence italienne. Mais alors on peut faire appel aux Provinces illyriennes restées sous la domination napoléonienne pendant un seul lustre mais dans lesquelles les Français ont été en mesure de mettre en œuvre le programme d’assimilation6.


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2. La francisation des îles Ioniennes au cours de la première occupation

Afin de s’attirer les sympathies des insulaires et en même temps de jeter une ombre sur le précédent régime vénitien, Bonaparte suggère à ses deux émissaires – le général Gentili, envoyé dans le Levant parce que corse et donc «insulaire (…) accoutumé au manège des insulaires»7 et l’intellectuel Arnault8 de chatouiller l’orgueil hellénique en évoquant les entreprises de Sparte et d’Athènes9. «Je suis venu pour rendre à la Grèce esclave depuis si longtemps, la liberté et l’égalité» déclame le général Gentili10. Et de conclure: «Les vertus des Miltiade et des Thémistocle ressurgiront bientôt et la Grèce sera réintégrée dans la splendeur des temps anciens»11. L’évocation de l’Hellade, il convient de le souligner, prend également pour le gouvernement français une valeur politique: dans le cadre du dessein palingénésique des Révolutionnaires, le mythe de la Grèce ancienne représente un élément important, comme l’a montré Jacques Bouineau12. Fondamental pour éduquer les Citoyens à la Vertu républicaine. Le projet de modifier la toponymie des îles en s’inspirant de l’Antiquité va dans ce sens et présente aussi l’avantage incontestable de flatter l’orgueil des autochtones 13. Dans la nouvelle toponymie, les entreprises de la République française et les principes de 89 doivent avoir leur place. Il apparaît indispensable de faire connaître et de faire aimer la Révolution aux habitants; eux aussi doivent être régénérés au nom de la liberté et de l’égalité14. Une civilisation à la double casquette qui interpelle à la fois les Français et les Levantins.

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La civilisation ne peut certes pas se reposer sur de simples images. On crée donc alors la Municipalité en suivant ce qui a été réalisé à Venise15. Et là les Français font leur premier faux pas, n’ayant pas compris la véritable complexité de cette société. Arnault demande aux autorités locales de dresser une liste de noms parmi lesquels il fera un choix, plutôt que de recourir à des élections. Il entend procéder à une homogénéisation de la société du Levant, en tenant compte de la réalité multiforme de la religion. Dix-huit orthodoxes, quatre catholiques (rectius, latins) et deux juifs entrent dans la Municipalité qui accueille également les ministres les plus importants de chaque culte16. Paradoxalement ce choix est une erreur politique. En admettant les juifs, Arnault (soutenu par Gentili) a accompli quelque chose d’intolérable pour les élites ioniennes, quelque chose qui représente une véritable rupture. L’émancipation des juifs non seulement déplaît aux orthodoxes et aux catholiques mais elle déchaîne une violente émeute populaire17. Par ailleurs, à l’intérieur de la Municipalité, les orthodoxes (grecs) et les catholiques (latins) veulent s’exclure les uns les autres 18. «Ils ne comprirent pas le concept de liberté, ils ne comprirent absolument pas le principe d’égalité», critique amèrement Arnault dans ses Mémoires19. Il est évident que chaque faction espère occuper une position d’hégémonie dans la Municipalité 20. On dirait que l’arrivée des Français tombe à merveille pour redéfinir les rapports de force à l’intérieur de la société des îles Ioniennes 21.

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La Municipalité, présidée par Spiridione Theotochi, figure de pointe des intellectuels des Sept-Iles, organise de multiples comités22. L’un de ceux-ci a pour tâche de s’occuper de la question de la justice: ce n’est pas un hasard si les Français estiment qu’il est primordial de mettre la main à la réforme de la législation judiciaire et du procès. Il s’agit d’un nouveau moment de discontinuité ; c’est encore un signal politique fort qu’on entend donner puisque, comme on le sait, c’est dans la juridiction que le pouvoir de Venise s’identifiait23. Dans tous les rapports rédigés par les autorités transalpines, il ressort des jugements lourdement critiques sur l’activité du provéditeur vénitien, étiqueté comme le principal responsable de l’état déplorable dans lequel se trouve la justice24. Or, comme Alfredo Viggiano l’a mis en lumière, le provéditeur en réalité n’avait pas les coudées franches, enfermé dans un tissu réticulaire de potentats locaux capables de mettre en discussion à Venise tout ce qu’il faisait à Corfou25. Les nouveaux dominateurs n’ont néanmoins pas la bêtise de croire que les dysfonctions ne dépendent que des fonctionnaires de la Sérénissime. Les juges locaux ont également leur part de culpabilité. Elus par les communautés, ceux-ci agissent comme les mandataires des groupes (Maisons ou familles, comme on choisit de les appeler) qui les ont votés. Ils administrent la justice selon une logique d’appartenance26. De là: «l’impunité ou une indulgence extrême dans les causes criminelles; la faveur et la partialité dans les causes civiles»27.

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En tout cas, où que ce soit, la corruption semble s’être répandue: «la vénalité dans les unes et les autres, en un mot le trafic de la justice procuraient à ces juges de riches émoluments (…). L’assassin achetait l’impunité de son crime, non seulement après l’avoir commis mais quelquefois même avant de le commettre»28.

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Edifier “une autre justice29 signifie pacifier et normaliser la société ionienne, en régénérer les coutumes, mais surtout procéder à son nivellement au nom de l’Egalité. La réalité du Levant apparaît lacérée par des inégalités sociales manifestes et intolérables. Rares sont ceux qui échappent à un jugement négatif. Certainement pas les nobles considérés comme une classe improductive qui brime les classes subalternes30. Les Français sont persuadés qu’ils ne peuvent compter que sur certains représentants du deuxième ordre et sur les paysans qui, bien qu’ignorants, valent «infiniment mieux»31. Dans cette perspective réorganiser la justice signifie empêcher que la société ne continue à être partagée entre oppresseurs et opprimés: «Là où les citoyens sont privés de la garantie des Lois et réduits à implorer celle des hommes, la société se divise en faibles et en puissants, en oppresseurs et en opprimés, en protégés et en protecteurs, et se subdivise en autant de classes qu’il y a d’hommes en état d’en opprimer ou d’en protéger d’autres»32.

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Voici les premières mesures: les juges de paix, les tribunaux de première instance et les tribunaux d’appel font leur entrée dans la législation judiciaire de l’Heptanèse. Les magistrats, élus par la Municipalité, ne sont toutefois pas mis en condition de pouvoir appliquer la législation française de sorte qu’ils jugent en se basant sur les sources traditionnelles, c’est-à-dire les lois locales et les Statuts vénitiens33. Il s’agirait d’une mesure temporaire mais, comme cela advient fréquemment, ce qui est provisoire est destiné à devenir stable. Nous en reparlerons.

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Si l’on en croit ce que rapporte Vlassopulo (cité par Lunzi) dans ses mémoires manuscrits, la réforme produit immédiatement ses effets, puisqu’on effectue tout le travail qui avait pris du retard avec une étonnante célérité et cela bien que les juges soient obligés de travailler sans émoluments en raison de la situation financière critique du moment34.

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La francisation procède plus rapidement lorsque le Directoire décide d’incorporer les îles à la mère patrie en les érigeant en trois départements dirigés par un commissaire général résidant à Corfou35. C’est Jean-Bonhomme de Comeyras à qui échoit cette charge. Un choix des plus honnêtes: homme politique et diplomate36, c’est avant tout un avocat de renom qui, à l’aube de la Révolution, a joué un rôle de premier rang dans le programme de réforme du droit pénal décrété par Louis XVI37. Suivant les directives qu’il donne38 on recrute vingt-cinq juges dans chaque département, on crée un tribunal correctionnel et on prépare la mise en activité des jurés d’accusation et des jurés de jugement. Les gouvernants, visiblement, ne font que concrétiser ce qui est disposé par la Constitution de l’An III39. Il faut cependant souligner que l’un des principes qui président ce texte – celui de l’électivité des charges publiques40 – est appliqué d’une manière quelque peu désinvolte. Au niveau cantonal, il est suivi; à des niveaux plus élevés de l’administration, il n’est pas observé, puisque les bureaucrates français y sont cooptés41 et que les magistrats sont nommés directement par le commissaire général42. On retrouve ainsi un exercice du pouvoir qui ne diffère guère du système vénitien.

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Fonctionnaire extrêmement actif, Comeyras crée une commission de cinq juristes venant de Zante, de Céphalonie et de Corfou dans le but de coordonner le droit français et le droit insulaire43. La francisation de la législation des Sept-Iles s’accomplirait-elle donc? La réponse est non, comme le prouve le comportement du commissaire général dans les mois qui suivent. Révolutionnaire ardent, il n’hésite pas à montrer une certaine animosité à l’égard des nobles et surtout à l’égard des ministres du culte (à ses yeux la religion se confond avec la superstition); il les exhorte publiquement à ne pas s’écarter des valeurs républicaines44. Là encore c’était un faux pas puisque la population se montre troublée par la véhémence des déclarations du commissaire. Si Arnault avait encore résidé dans les îles de l’Heptanèse, il aurait pu lui conseiller une plus grande prudence. Même le Directoire exécutif est déconcerté par une telle intempérance, au point qu’il est décidé d’éloigner Comeyras. Quoi qu’il en soit, la société des îles Ioniennes, qui au début n’était pas hostile, montre une désaffection croissante envers les nouveaux dominateurs, surtout lorsque les troupes françaises brocardent publiquement et impunément le culte des reliques de Saint Spiridion, «la vieille carcasse»45. Les autorités ne se rendent pas compte que le corps du saint, qui appartient à l’une des familles corfiotes, représente quelque chose qui va au delà du sentiment religieux et de l’auto-identification de la communauté grecque. La famille qui en possède les dépouilles exerce un pouvoir politique, informel et invisible, sur toute la communauté, pouvoir qui dépasse celui de l’Eglise et de l’Etat46. Qu’en un court laps de temps, les émeutes se multiplient et les habitants exultent devant les défaites de ceux que, dorénavant, ils considèrent comme des tyrans, n’a rien d’étonnant. Lorsque les Français reviendront en 1807, ils comprendront qu’ils ont commis une erreur monumentale en 179947.


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3.La réforme de la législation durant la République des Sept-Iles. Examen sommaire.

Avec la chute des Français on établit un gouvernement provisoire (sous la protection de l’amiral russe Ouchakov et du commandant turc Kadir Bey) qui se met aussitôt à réformer la législation. En peu de temps, il présente une constitution (Provvisorio Piano di Governo per le isole ex venete liberate dai Francesi e dell’ordine da stabilirsi in esse48) ainsi que ce que nous pourrions définir un projet de code de procédure civile et pénale (Regole Generali per tutti li Tribunali di Giustizia civile e criminale49). Si l’on borne l’analyse de ces textes aux aspects concernant la réforme de la justice pénale, on peut remarquer des éléments à la fois de continuité et de discontinuité par rapport aux choix de politique législative qu’avaient faits les Français au cours de leur première occupation.

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En ce qui concerne la législation judiciaire, deux éléments de discontinuité apparaissent: réintroduction du principe d’électivité et mise à l’écart de l’institution du jury50.

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Dans la partie des Regole Generali per tutti li Tribunali di Giustizia qui règlemente, même sommairement, le procès pénal, l’influence française est indéniable: on maintient les principes de motivation (principe ignoré du droit vénitien)51 et de publicité des jugements52. Egalement là où le législateur exhorte les juges à «avere a cuore che la pena sia certa, solecita, vicino al delitto»53, ou encore, lorsqu’il leur rappelle que le suspect «venga tenuto in un arresto di semplice custodia e non di pena»54, nous croyons ne pas nous tromper lorsque nous y trouvons des échos transalpins.

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En fin de compte, même la norme qui prescrit de se référer au droit en vigueur (c’est-à-dire aux statuts municipaux et vénitiens) comme base des jugements s’inscrit dans la continuité avec la ligne suivie par les Français. Néanmoins on peut relever des différences considérables. Alors que le renvoi au droit en vigueur en 1797 était plutôt général, le législateur du gouvernement provisoire ionien ose préciser que les juges «seguiteranno i princìpi e la massime usitate in queste località coerenti alle leggi, Prattiche Venete non obsolette, combinate con equità e co’ dettami della propria coscienza»55. Nous nous trouvons devant un point névralgique, extrêmement délicat, puisque, seules d’autres recherches permettront de comprendre si les rédacteurs ont voulu faire référence à l’arbitrium vénitien56 ou s’il s’agit d’une indication générale semblable à celle qu’avait fixée le législateur léopoldin de 1786 dans le célèbre article 118. Au delà de cela, une donnée émerge avec netteté, représentant une constante: la réforme du droit pénal substantiel apparaît comme secondaire par rapport à celle du procès. Ce qui apparaît prioritaire, c’est de garantir une justice impartiale, d’empêcher que l’esprit de faction, trait endémique de la société ionienne, ne l’emporte. Nous en sommes arrivés à un tel sentiment devant une disposition du texte constitutionnel de 1799 dans lequel on établit que durant l’élection des charges (et donc également de celles des magistrats) il faut «scordarsi ogni relazione, avversione, amicizia, interessi ed avere in considerazione quelle Persone che avranno colla più lodevole condotta manifestato fino ad’ora l’essenziale carattere di probità e che meritino che loro sia affidato il Governo della Patria»57.

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Peu après, on institue formellement la République des Sept-Iles, sous le protectorat russe et turc. Au cours de ses six années d’existence, on assiste à la promulgation de trois constitutions qui reflètent les différents rapports de force qui peu à peu vont s’instaurer entre les Russes et les Turcs et, dans les îles, entre représentants de la noblesse et représentants de ce qu’on appelle le deuxième ordre. C’est sur la constitution de 1803 que nous entendons nous arrêter quelques instants. En parcourant les normes consacrées au règlement du pouvoir judiciaire, on peut noter combien le modèle de référence est manifestement le modèle français. On retrouve dans ses replis le tribunal de Cassation58 ainsi que l’institution du jury (qui avait été écartée en 1799 et en 1800 et qu’on en arrive alors à définir de «sublime institution»59 à laquelle recourir pour «tous les délits qui emportent une peine afflictive ou infâmante»60. Comment expliquer ce soudain coup de foudre? Selon la reconstruction de Carlo Ricotti, le fait de s’inspirer de la France obéirait à une volonté essentiellement politique. Le tsar Alexandre Ier aurait exercé des pressions allant dans ce sens pour flatter Napoléon61.

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Et la codification? En 1804, les Sept-Insulaires approuvent leur premier code qui vise à réglementer le procès civil. Là encore on retrouve une constante: l’article 326 maintient en vigueur le droit vénitien et les lois municipales dans l’attente de la promulgation du code civil62, code civil qui n’arrivera que quarante ans plus tard63 !


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4. Droit et politique dans l’Heptanèse et à Corfou à l’époque napoléonienne.

Par le traité de Tilsit de 1807, les Français débarquent pour la seconde fois dans l’archipel.

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Napoléon envoie le général Berthier à Corfou, en lui recommandant de «bien traiter les habitants, de s’en faire aimer, de leur laisser leur constitution »64. Tout au contraire, Berthier en fait à sa tête, proclame immédiatement l’union à l’Empire et procède à une nouvelle organisation des îles qui se résume à concentrer tous les pouvoirs dans les mains du gouverneur général. Napoléon est en colère, il craint que les troupes russes installées à Corfou ne se soulèvent, poussées par le parti pro-russe65. A la fin, redoutant la possibilité d’une invasion anglaise, l’Empereur se sent obligé de ratifier dans leur ensemble les actes de Berthier66. C’est ainsi que le décret du 10 novembre 1807 voit le jour: il confie l’administration militaire et civile au ministère de la Guerre en la personne du gouverneur général, aux côtés duquel un commissaire impérial est chargé de soumettre les problèmes aux ministères parisiens compétents. Bien évidemment, les institutions centrales comme le Sénat ou les institutions locales sont conservées mais elles jouissent d’une autorité purement nominale67.

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En revanche, pour ce qui concerne la législation et l’administration de la justice, ce décret établit le maintien en vigueur de la législation existante, c’est-à-dire le droit municipal et les statuts vénitiens. C’est là l’aspect le plus intéressant de notre analyse. Napoléon a compris que le fait de maintenir le statu quo postule la renonciation à l’application de la législation française. L’Empereur a été à même d’interpréter les événements de 1797 et de 179968. Heurter une nouvelle fois le sentiment religieux des habitants du Levant mènerait à la perte des îles. Selon toute probabilité, l’introduction du code civil serait perçue par les habitants de l’Heptanèse comme une nouvelle tentative de niveler et de laïciser la société. Voilà ce qu’on peut appeler une authentique intuition politique.

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C’est Julien Bessières69, consul général à Venise, qui est désigné en tant que commissaire impérial. C’est, sans aucun doute, le fonctionnaire le plus apte pour recouvrir cette charge: il connaît très bien la réalité des Sept Iles70, parle l’italien et le romaïque (le grec vulgaire parlé). Napoléon le considère comme quelqu’un capable de freiner l’intempérance de Berthier. En vérité, Bessières se révèle tout aussi énergique, si ce n’est plus, que le gouverneur général Berthier, qui en 1808 sera licencié71. En quelques mois, Bessières montre qu’il veut procéder à une transformation radicale de la société ionienne. Le tableau qu’il nous peint de l’Heptanèse est désolant: «un pays entièrement dépourvu de lumières, de bonnes institutions, de bonnes lois, de bonnes mœurs, où l’ordre social n’était qu’ébauché et présentait un aspect à demi sauvage; où la justice était un fléau, où la police n’existait pas; où les finances étaient dans le plus grand désordre; où l’éducation tant publique que domestique était nulle; où les trois cultes qui y sont établis rivalisaient de superstitions (…)»72.

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Il souhaite agir sur tous les fronts: il s’occupe de questions économiques73, de l’instruction et de l’organisation des cultes. En ce qui concerne la justice, il a les idées plutôt claires. Au mois de mai 1808, il écrit au ministre de la Justice pour lui soumettre un texte de loi sur l’organisation de la procédure civile et criminelle, déjà entré en vigueur, bien que provisoirement, et qui sort de la plume des sénateurs74. La question de la justice lui apparaît tout aussi urgente et, à ce qu’il semble, il s’agit d’une exigence également ressentie par la société civile75.

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A son avis, il est fondamental de repenser le recrutement des magistrats: les Russes avaient introduit le critère de l’éligibilité qui s’était révélé pernicieux dans une société où les élus se sentent les obligés de leurs électeurs, de leur faction76. La seule solution possible est la sélection sur la base de capacités professionnelles avérées et de qualités morales exemplaires. Bessières dénonce un second défaut attribuable au fait que les magistrats, ne percevant aucun émolument, se laissent corrompre77. En outre, comme ils travaillent gratuitement, ils accomplissent leurs fonctions avec discontinuité prolongeant les procès à l’infini78.

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Jusqu’ici rien de bien original: mêmes dénonciations, mêmes réclamations, mêmes demandes de réformes que celles avancées en 1797 et en 1799 qui avaient fait l’objet de deux textes législatifs (celui de 1799 et celui de 1804). A vrai dire, on trouve quelques éléments de nouveauté dans le rapport qui accompagne le petit code de procédure civile et pénale. Pour la première fois, on souhaite la réforme du droit substantiel. Mais là encore le tableau qu’on en donne est démoralisant. Un droit archaïque et barbare: c’est ainsi que sont définis le droit pénal municipal et le droit statutaire vénitien en vigueur dans les Sept Iles. La plupart de cette législation, comme le souligne Bessières avec soulagement, est tombée en désuétude et elle a été remplacée par des coutumes plus raisonnables mais il reste le fait qu’elles ne sont pas écrites et qu’il y en aurait d’autres à modifier79. Quant au droit privé, le jugement qu’on porte sur lui n’est pas différent80. Aussi pouvons-nous aisément pressentir le remède à ce fatras: «Votre Excellence jugera dans sa sagesse s’il ne conviendrait pas, d’après ces considérations, d’introduire dans les îles Ioniennes notre Code criminel, et surtout le Code Napoléon»81.

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Nous nous trouvons devant la proposition de franciser les îles, comme cela arrive dans tout territoire conquis par les Transalpins.

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Et Paris? Voilà la réponse. Sur une petite feuille manuscrite signée par le ministre et adressée à ses fonctionnaires, on peut lire: «Le Grand Juge n’a rien à ordonner dans l’île de Corfou» 82. Mais Bessières n’en démord pas. Par l’intermédiaire du ministre de la Guerre, il bombarde de missives le ministre de la Justice, Regnier. A la fin, au bout de dix mois, nous sommes en janvier 1809, c’est un Garde des Sceaux visiblement exaspéré qui envoie son rapport sur le petit code procédurier des îles Ioniennes. C’est une véritable réprimande que celle de Regnier. Sur tous les plans: aussi bien en ce qui concerne la méthode que le contenu du texte.

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Si l’on veut étendre la législation nationale, il ne faut pas laisser les mains libres aux autorités locales, observe-t-il: «il auroit fallu, comme on l’a pratiqué pour tous les autres pays réunis, choisir dans le recueil des loix françaises les dispositions qui y étoit plus urgent d’y mettre en activité, et en ordonner la publication, on y en auroit ajouté d’autres à mesure que la pratique (…) s’y seroit établie»83. C’est la règle que tout législateur français doit absolument suivre dans les nouvelles possessions. Le Sénat ionien, poursuivit-il, a suivi une autre méthode. Il semble, tout d’abord, qu’il ait pris comme modèle les normes françaises «mais cette imitation n’est qu’apparente». On institue les juges de paix, les tribunaux de première instance et d’appel «mais leur organisation est souvent toute différente de celle des tribunaux désignés en France par les mêmes noms»84. Le nombre des magistrats est exorbitant et il est singulier que les juges d’appel ne soient pas rémunérés plus que ceux de première instance: «les fonctions de la magistrature se dégradent nécessairement par ce mélange»85. Les observations concernent le plus souvent le procès civil, qui apparaît au ministre quelque peu étrange. Pour ne donner que quelques exemples: le ministre désapprouve vivement la norme qui règle le procès en contumace en tant que contradictoire86, juge les termes d’appel très étroits et stigmatise la norme qui permet au juge de condamner sans aucune restriction à la prison pour dettes.

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«La procédure criminelle seroit susceptible d’autant d’observations que la civile», poursuit Regnier. Il est à bout et se contente d’une seule remarque: «j’y trouve extraordinaire qu’on exige de l’accusé qu’il consigne les frais de la sentence qui le condamne, avant de pouvoir en appeler. Combien d’innocents se trouveroient par là dans l’impuissance de se faire rendre justice»87. Contrairement à ce à quoi on aurait pu s’attendre, le ministre ne conseille pas d’introduire les codes français, comme le souhaite Bessières. Il se borne à conclure sa lettre d’une façon interlocutoire: «dans ce que je viens de dire, j’ai moins eu l’intention de censurer le projet que de montrer combien il s’éloignait des institutions françaises»88.

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Avant de découvrir quelle sera l’attitude de Bessières, il semble opportun de nous arrêter sur les dispositions qui règlent le procès criminel. En parcourant les normes, on note tout de suite que le texte élaboré par le Sénat n’est rien d’autre qu’un perfectionnement de celui qui a été projeté en 179989. C’est une fois encore une loi extrêmement concise: cinquante-quatre normes règlementant le procès devant les juges de paix, les tribunaux criminels de première instance et les tribunaux d’appel. Nous retrouvons là les principes de garantie. On y assure la publicité des jugements, on y accueille le principe de l’oralité, du contradictoire90 et de défense91, l’obligation de motiver la sentence92. Nous nous trouvons devant un procès qui se déroule en deux phases, l’instruction et le débat, un procès tendanciellement mixte visant à relier un premier moment de nature inquisitoriale93 à un second conforme aux principes accusateurs de l’oralité94, de la publicité et du contradictoire, principes auxquels nous avons déjà fait allusion. Certes, il ne manque pas d’éléments qui rendent le tableau nettement plus complexe et qui mériteraient d’être approfondis, entre autres en dépouillant les documents qui ont pu être sauvés aux archives de Corfou. Par exemple, comment interpréter l’article 2495? On pourrait tout d’abord le prendre pour un hymne au procès juste, là où on affirme que «l’ unico oggetto della giustizia (è) di rilevare la verità affinché il reo non si nasconda o l’innocente perisca».En réalité, la norme pourrait être conçue de la même façon que celle dont se déroule le procès dans les codifications pénales des Habsbourg, c’est-à-dire une procédure ayant pour but la preuve de la vérité “matérielle”96: objectif qui entraîne la faculté, pour le tribunal, de recueillir à n’importe quel moment du procès de nouvelles preuves confirmant la culpabilité ou l’innocence. D’autre part, cette disposition pourrait être considérée comme un renforcement de l’article 276 du Code Merlin97. Ou encore on pourrait trouver cette dérivation dans le Code Romagnosi qui, à son tour, reprend une norme du projet de Code criminel de 1801-180298. Indépendamment de tout cela, il reste que le but du procès, prouver la vérité, comme le souligne Ettore Dezza, est un principe ancien «che trova lontane radici nella tradizione canonistica»99.

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Des échos transalpins émergent dans ce texte, tout comme on relève un élément de discontinuité important dans les choix adoptés par les Français en 1797 (et par les habitants des Sept-Iles en 1803), puisqu’il n’y a pas trace de l’institution du jury. D’ailleurs, contrairement à ce qui se passera à Malte100, cet organe ne sera pas même récupéré lors du protectorat britannique101.

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Quant à la tradition juridique vénitienne, elle est bien présente. Par exemple, là où on parle de la Coartata, la production de témoins en mesure de fournir un alibi au coupable102:

«22. La diffesa dei prevenuti deve rissolvere le prove del processo sia eccependo i testimonj per cause determinate dalla procedura, sia proponendo la prova della coartata. La coartata non sarà però admessa nella difesa quallor dai prevenuti non sia stata adotta nell'atto che fossero esaminati col rimprovero delle loro colpe».

«26. Provata pienamente la Coartata con prove uniformi e convincenti il Tribunale apre la procedura per riconoscere quali siano le testimonianze vere quali le false se quelle del processo a offesa, o quelle della coartata».


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Nous la retrouverons dans le code de procédure pénale de 1844: le chapitre III du titre II (Della procedura ne’ giudizj de’misfatti) réservera à la Coartata sept dispositions 103.

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A la lecture d’une norme qui semblerait reproduire ce qui a été exprimé en 1799, il apparaît que ce projet de code a été conçu comme un texte de transition:

«51. Base dei giudizi dei Tribunali Criminali saranno le Leggi Venete in osservanza e non obsolete, rattemprate dall'equità e dalle massime del Governo attuale fino a nuove disposizioni»104.


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Nous avons utilisé le conditionnel car nous estimons qu’il existe des différences et non des moindres. Le rappel des «Prattiche Venete non obsolette» a disparu mais surtout on ne retrouve plus le renvoi aux «dettami della coscienza» du juge105. A sa place apparaissent les «massime del Governo attuale». Les principes au moyen desquels renforcer la législation vénitienne sont d’ores et déjà indiqués par le Législateur. Il s’agirait d’une solution analogue à celle qu’avait suivi le législateur toscan de 1786.

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Une première analyse très rapide du texte de 1808 met en évidence l’existence de ses multiples sources (tradition vénitienne, tradition française et tradition italienne de Milan et ses alentours106) suivant ce qui se révélera une constante de la codification ionienne du XIXe siècle. Mais nous reviendrons sur ce point spécifique au terme de notre discours.

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Nous avions laissé Bessières alors qu’il recevait la missive du Grand juge. Bien que sa demande d’application des codes français n’ait pas été acceptée, le commissaire impérial ne désespère pas. Il se prodigue afin que les juges travaillent. Il demande aux tribunaux un compte rendu mensuel des procès, surveille avec attention leur conduite ne manquant pas de condamner quelques juges corrompus. Selon lui, en treize mois on mène à bien quinze mille procès107! Il s’occupe même de l’éducation juridique souhaitant que la profession d’avocat ne soit autorisée qu’après l’obtention de l’examen d’habilitation dans les universités impériales108. A ses yeux «prêtres, médecins, avocats rivalisent d’ignorance»109. Ce pourquoi il propose d’épurer l’ordre des avocats. Le ministre de la Guerre est, pour le moins, perplexe et ne manque pas de faire connaître son état d’âme à son collègue Garde des sceaux. Un extrait de sa missive mérite d’être reporté: «Votre Excellence aura pu remarquer par la lettre de M. Bessières que ce Commissaire impérial pense qu’il est bien essentiel de soumettre à une épuration le corps entier des avocats et des procureurs qu’il regarde comme beaucoup trop nombreux, et de faire de grandes réformes dans la législation. Les observations de M. Bessières paraissent dictées par son amour pour le bien public, et pour le service de sa Majesté, cependant je ne dois pas laisser ignorer à votre Excellence que l’Empereur, par son décret de 1807, avait déterminé qu’il ne serait apporté aucun changement dans les loix du pays. Il pourrait donc être dangereux d’apporter de suite de trop grandes innovations dans la législation des Sept-Iles»110.

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Le message est clair. Bessières ne se rend pas compte qu’il est primordial de maintenir la mainmise sur les îles et que pour cela il faut renoncer à tout projet de réforme de la législation. C’est Napoléon en personne qui l’a établi par son décret de 1807. Nous ne connaissons pas la réponse du ministre mais nous savons que Bessières s’éloignera des Iles111.

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Le Comte de Lesseps112, successeur de Bessières, appelé à administrer l’île de Corfou avec le gouverneur Donzelot, aura à son tour des problèmes avec les autorités centrales. Lui aussi apparaît choqué par l’état dans lequel se trouve la justice. Il parle «d’abus sans nombre, d’injustices journalières». La solution avancée est toujours la même: « de porter la hache à la racine des abus ; c'est-à-dire de détruire en son entier l’ancienne législation suivie par les tribunaux et de donner aux îles un Code»113. Donzelot, qui est du même avis, appuie l’initiative de Lesseps consistant à confier à deux éminents membres du Sénat, Theotochi et Metaxa, l’examen du Code Napoléon114. Theotochi et Metaxa sont deux influents juristes des îles ioniennes qui se montrent favorables aux Français. Ce n’est donc pas un hasard s’ils sont cooptés dans la délégation du Sénat qui désire se porter à Paris pour se féliciter l’Empereur de la naissance du Roi de Rome115. Leur rapport sur le code civil est somme toute positif, quoiqu’il ne s’agisse pas d’une approbation inconditionnelle : « notre devoir – écrivent-ils – nous oblige à faire observer que quelques unes de dispositions de ce Code choquent ouvertement des opinions invétérées auprès du peuple ionien; et qu’elles ne pourraient être adoptées par eux que quelques années après l’époque heureuse où le Code leur aurait été donné. Par le dispositions du Code, le mariage est un contrat purement civil aux yeux de la loi. Ce code permet le mariage entre parents, à des degré que les lois ecclésiastiques prohibent et il annule par des motifs que ces lis ne jugent pas valables »116. Oui, au code civil mais adapté aux mœurs ioniens.

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Cette fois la réponse du ministre de la justice n’est pas négative, mais pis peut être, elle est évasive. Nous estimons que Regnier a su lire entre les lignes les difficultés que pouvait entraîner l’application du droit de famille napoléonien. « Les pièces qui accompagnent le rapport annoncent bien qu’il y a beaucoup à réformer dans la législation civile et criminelles des Iles Ioniennes, mais je n’y trouve point des notions assez précises pour pouvoir en fixer sur les réformes qu’il conviendrait de proposer à S.M. (….) » écrit le ministre117. En d’autres termes il temporise.

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Deux ans après, Lesseps revient à la charge avec les mêmes arguments118. Mais une fois encore, Paris est inébranlable. Nihil innovetur. Fait intéressant, dans ce cas c’est un citoyen français de Corfou à en faire les frais. Désireux de divorcer de sa femme, française elle aussi mais résidante à Paris, ce dernier s’est adressé au tribunal civil de première instance qui a rejeté sa demande excipant du défaut de juridiction. Selon la législation en vigueur, c’est le tribunal ecclésiastique orthodoxe qui s’occupe de la matière du divorce119. La protestation du fonctionnaire français ne se fait pas attendre. Devant le silence de Lesseps120, lui-même et sa femme, s’adressent directement au ministre de la Justice à Paris. La réponse est lapidaire: si vous entendez divorcer, vous devez instruire l’instance devant un tribunal français121. Monsieur Loque a-t-il sauté dans le premier bateau cinglant vers la France? Il ne nous est pas permis de le savoir. Ce qui est certain, c’est qu’on sait dorénavant quelle est la ligne à suivre. Intrasti in Corcyram; ambula iuxta ritum eius. Pour le bien de la France. Pour le bien du dernier avant-poste qu’elle a possédé en Méditerranée.


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5. Epilogue

Durant l’occupation française du Levant, nous avons assisté à deux politiques différentes du droit.

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Au cours de la première, la francisation de la législation ionienne est considérée comme indispensable pour rallier les habitants des Sept-Iles aux principes de la Révolution et s’assurer ainsi leur confiance et leur collaboration. Une civilisation qu’on réalise, entre autres, en ressuscitant la Grèce ancienne comme exemplum de société vertueuse. On pense que ranimer ce souvenir est le moyen le plus efficace pour consolider la mainmise sur les îles que l’on considère comme une forteresse fondamentale dans le cadre du dessein expansionniste en Méditerranée. Une telle politique produit des résultats imprévisibles, puisqu’elle réveille un double orgueil, à la fois grec et insulaire. Or cet orgueil coexiste avec la volonté intouchée de rester unis aux libérateurs français. Cependant, lorsque les habitants de l’Heptanèse comprennent qu’on leur refuse la possibilité de s’auto-administrer prévue par la constitution de 1795, et que la politique du gouvernement français dans les îles vise à la laïcisation de la société allant jusqu’à la dérision de la religion (une religion qui dans les fibres des Sept-Insulaires s’auto-identifie dans leur appartenance à la communauté grecque), on enregistre, très vite, une désaffection croissante de la population. On prône l’expulsion des Français, une expulsion ressentie comme libératoire. Reconnaissons, toutefois, que la francisation de la législation, une assimilation réalisée seulement pour ce qui concerne la structure de la justice, bien qu’on ait jeté les bases pour l’application du droit substantiel transalpin, durant la République des Sept-Iles, produit des effets immédiats. Qu’il faille réédifier la législation est un point de non-retour. Et les instruments pour réaliser un tel programme se trouvent bien à la fois dans la constitution et dans le code.

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Au cours de la seconde domination, on a vu comment la politique du droit va dans la direction opposée. La législation est maintenue en vigueur dans l’état dans lequel elle se trouvait. Gare à la modifier, prévient l’Empereur, autrement on court le risque de perdre la mainmise sur les îles. Il a fort probablement compris qu’introduire le code civil signifierait procéder au nivellement et à une sécularisation de la société qui ne serait pas sans conséquences sur le plan de l’ordre public. Les commissaires impériaux qui avancent avec obstination la nécessité d’introduire les codes transalpins sont destinés à être muselés. Si, en 1808 l’organisation des tribunaux de justice et de procédure civile et criminelle entre en vigueur, on le doit essentiellement à l’initiative personnelle de Bessières qui semblerait avoir laissé les mains libres aux Sénateurs pour ce qui concerne le contenu. Du reste, l’histoire enseigne que c’est précisément lorsqu’on parle du procès pénal que Napoléon et les souverains installés dans les Etats satellites de l’Empire sont enclins à laisser faire les autorités locales: le cas du code Romagnosi dans le Royaume italique et celui du Règlement et de la loi de 1808 à Naples vont dans ce sens122. Or, l’aspect le plus étonnant de cette histoire, c’est qu’à la moitié du XIXe siècle, alors qu’on se met à codifier dans les îles Ioniennes, les juristes s’en remettent aux modèles français. S’il est vrai que ces modèles se concilient avec la tradition juridique locale, avec la tradition vénitienne123 et avec certains éléments dérivant de l’expérience juridique anglaise, il est également vrai que l’ossature est transalpine124. Une ossature bien évidemment adaptée aux mœurs de la société du Levant.

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La codification française que Napoléon n’a pas imposée par la force s’est-elle auto-imposée en vertu de sa rationalité scientifique? Non ratione imperii, sed imperio rationis, pour reprendre une formule bien connue des historiens du droit? Il n’est pas si simple de réduire cette question, comme montrent bien les recherches stimulantes de Sylvain Soleil sur la présence du modèle juridique français dans le monde125. Notre étude sur le processus de codification dans les îles Ioniennes mérite d’être approfondie nécessairement à Corfou. Une aventure séduisante et agréable sans aucun doute.

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Notes:

* Professeur d’histoire du droit à l’Università Cattolica del Sacro Cuore, Milan.

1 Bonaparte au Directoire exécutif, 16 août 1797, in Correspondance de Napoléon Ier, publiée par ordre de l’Empereur Napoléon III, Paris, 1869, III, 235.

2Bonaparte au Ministres des Relations extérieures, 16 août 1797, in Correspondance de Napoléon Ier, ivi, 237.

3 Précisément 1797-1799 pendant vingt mois, et, après la parenthèse de la République des Sept-Iles, de 1807 à 1809 et à Corfou jusqu’en 1814. V. E. Lunzi, Storia delle isole jonie sotto il reggimento dei repubblicani francesi, Venezia, 1860; E. Rodocanachi, Bonaparte et les îles ioniennes, Paris, 1899; G. Damerini, Le isole jonie nel sistema adriatico : dal dominio veneziano a Buonaparte, Milano, 1943; J. Baeyens, Les Français à Corfou, Athènes, 1973; C. Gut, Iles ioniennes, in Dictionnaire Napoléon, Paris, 1989, 937-938; N. G. Moschonas, L’idéologie politique dans les îles ioniennes pendant la période républicaine (1797-1799), in La Révolution française et l’hellénisme moderne, Athènes, 1989, 123-136; H. Yannacopoulou, Français, Républicains et Impériaux aux sept îles ioniennes: quelques aspects de leur présence, in La Révolution française et l’hellénisme moderne, op. cit., 137-154; V. Haegelé’, Un pion de taille sur l’échiquier napoléonien en Méditerranée: Corfou, in Espaces en jeu ou espaces isolés? Iles et insularité dans les relations internationales, Recherches sur les relations internationales des origines à 1914, Société Arnauld de Pomponne, Etudes pomponiennes, 2, (2005), 24-37; C. Ricotti, Il costituzionalismo britannico nel Mediterraneo (1794-1818), Milano, 2005, 321-329, 361-363.

4 L’occasion pour réfléchir sur la présence du modèle juridique français dans les îles Ioniennes nous a été offerte par la découverte aux Archives Nationales de Paris de la loi sur l’ Organizzazione dei Tribunali di Giustizia e Procedura civile e criminale delle sette isole greche dell’Ionio, Tipografia Nazionale di Corfù, 1808 et du courrier entre le Commissaire impérial à Corfou Bessières et le Ministre de la justice Regnier appelé à se prononcer sur ce texte: Archives Nationales, Paris, BB 5 295. Autres exemplaires aux archives de Corfou: C. R. Ricotti, Il costituzionalismo britannico nel Mediterraneo (1794-1818), Milano 2005, 375, n. 155 e 560). Sur le problème du modèle juridique français dans le monde v. les perçants travaux de S. Soleil, LeModèle juridique français : recherches sur l'origine d'un discours, in Droits, Revue française de théorie juridique, 2003, 38, 83 et s.; La circulation dumodèle juridique françaisentre discours et réalité depuis la Révolution, Tijdschrift voor Rechtsgeschiedenis, 2005, 71 et s.; Le Code civil de 1804 a-t-il été conçu comme un modèle juridique pour les nations ?, in Percezioni e impieghi del diritto francese come modello giuridico nell’Europa del XIX secolo, in Forum Historiae Iuris (M. Meccarelli, S. Solimano, H. P. Haferkamp dir.), 2005 www.forhistiur.de; El Código Civil de 1804 ¿ha sido concebido como un modelo jurídico para las naciones?, M. Tapia, M. Martinic et S. Rios (dir.), Sesquicentenario del Codigo civil de Andres Bello, LexisNexis, 2005, 45 et s.

5 A. Cavanna, Codificazione del diritto italiano e imperialismo giuridico francese nella Milano napoleonica: Giuseppe Luosi e il diritto penale, in Ius mediolani. Studi di storia del diritto milanese offerti a Giulio Vismara, Milano, 1996, 659-760; à présent également in Id., Scritti di storia giuridica, II, Napoli, 2007, 833-927.

6 Avec beaucoup de retard les codes français entrent en vigueur dans les provinces illyriennes: v. AN, BB, 5 295.

7 Bonaparte à Gentili, 26 mai 1797, in Correspondance de Napoléon Ier, op. cit., III, 68. Baeyens, op. cit., 19.

8 «Le citoyen Arnault, homme de lettres distingué, suivra l’expédition (…) il observera ces îles, tiendra avec moi une correspondance suivie de tout ce qu’il verra, vous aidera dans la confection des manifestes, et vous pourrez même, s’il est nécessaire, le mettre à la tête de l’administration du pays»: ivi, 69.

9Ivi, 68.

10 Lunzi, Storia delle isole jonie, op. cit., 38.

11 Lunzi, ibidem; Baeyens, Les Français à Corfou. op. cit., 19; Moschonas, L’idéologie politique dans les îles ioniennes, op. cit., 124.

12 J. Bouineau, Les toges du pouvoir ou la révolution de droit antique 1789-1799, Toulouse 1986, 81-83, 99-107, 195-200.

13Isles du Levant, Génie. Corcyre, rapport par Morio, in D. Anoghiatis Pelé’, Six rapports français concernant les Iles Ioniennnes et le continent voisin, Corcyra, 1993, 17-24.

14Le quartier Eriso de Corfou rebaptisé comme Quartier de la fraternité: Ivi, 24. Sur la régénération en tant que mot-clé de la Révolution M. Ozouf, Rigenerazione, in Dizionario critico della Rivoluzione francese, a cura di F. Furet e M. Ozouf, ed. it. a cura di M. Boffa, Milano, 1988, 748-757.

15 V. G. Scarabello, Da Campoformido al Congresso di Vienna: l’identità sospesa, in Storia della cultura veneta, 6, Vicenza, 1986, 1-5.

16 Lunzi, Storia delle isole Jonie, op. cit., 41 ss.

17Rodocanachi, Bonaparte et les îles ioniennes, op. cit., 42-50.

18Souvenirs d’un sexagénaire, par A. V. Arnault, Paris, 1833, III, 112, 113.

19Ivi, 112.

20 V. A. Viggiano, Lo specchio della Repubblica, Venezia e il governo delle isole Ionie nel ‘700, Verona, 1998, 197-249; Id., Venezia e la Chiesa greca. Forme del potere e modi del conflitto nelle isole del Levante, in Il Mediterraneo centro-orientale tra vecchie e nuove egemonie, Roma, 1998, 21-32; A. Nikiforou, Il contributo di Angelo Maria Querini alla pacifica convivenza della Chiesa ortodossa e latina nell’isola di Corfù nel Settecento, in Angelo Maria Querini a Corfù. Mondo greco e latino al tramonto dell’Antico Regime, Atti del convegno (Brescia, 11 marzo 2005), a cura di E. Ferraglio e D. Montanari, Brescia, 2006, 39-64.

21Sur les rapports de Arnault à Bonaparte Souvenirs d’un sexagénaire, op. cit., III, 378-390.

22 Lunzi, Storia delle isole Jonie, op. cit., 46.

23 Pour ce qui concerne l’arbitrium à Venise v. G. Cozzi, Repubblica di Venezia e Stati italiani, Politica e giustizia dal secolo XVI al secolo XVIII, Torino, 1982.

24Six rapports français concernant les Iles Ioniennnes et le continent voisin, op. cit., passim.

25 Viggiano, Lo specchio della Repubblica, op. cit., 120 e ss; E. Lunzi, Della condizione politica delle isole Jonie sotto il Dominio veneto, Venezia, 1858, 412-425.

26 V. M. Folin, Spunti per una ricerca su amministrazione veneziana e società ionia nella seconda metà del Settecento, in Studi veneti offerti a Gaetano Cozzi, Venezia, 1992, 342. Cfr. Toutefois Viggiano, Lo specchio, cit., 180.

27Mémoire sur les îles ioniennes, Des îles ioniennes sous le Gouvernement Vénitien, J. Bessières, in Six Rapports, op. cit., 267.

28Ibidem.

29Sur les réformes judiciaires de la Révolution française v. Une autre justice. Contribution à l’histoire de la justice sous la Révolution française, sous la dir. R. Badinter, Paris, 1989; J. P. Royer, Histoire de la justice en France, Paris, 1995; J. M. Carbasse, Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, II ed., Paris, 2006, 408 ss.

30Ivi, 272. Les médecins et les avocats sont regardés comme «les plus ignorants qui soient sur la terre» (ibidem), et comme «classe la plus corrompue et la plus vile » (ibid.).

31Ivi, 270.

32Ivi, 271.

33 Lunzi, Storia delle isole jonie sotto il reggimento, op. cit., 63. Cozzi a remarqué que: «il diritto veneto (…) intendeva soprattutto affermarsi con quanto gli era più peculiare e prezioso, la procedura; quanto al diritto sostanziale, il diritto veneto si vedeva riserbare in esclusiva il settore penale; laddove le consuetudini locali resteranno in vigore in quello civile» (Repubblica di Venezia, op. cit., 230-231).

34 Lunzi, Storia delle isole jonie sotto il reggimento, op. cit., 65. V. M. Paladini, Né uomini, né strutture. Ultimi anni del dominio veneto nelle isole Ionie attraverso i dispacci dell’ultimo provveditore Generale Da Mar Carlo Aurelio Widmann, in Atti dell’Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed arti, CLII (1993-1994), Classe di scienze morali, lettere e arti, 222.

35 Il s’agit du général Chabot: Lunzi, Storia delle isole jonie sotto il reggimento, op. cit., 109.

36Cfr. Lunzi, ivi, 111; Rodocanachi, Bonaparte et les îles ioniennes, op. cit., 79.

37 S. Solimano, Verso il Code Napoléon, Il progetto di codice civile di Guy Jean-Baptiste Target (1798-1799), Milano, 1998, 181-183.

38Comeyras est contraint de rester en Italie pour rassembler les fonds nécessaires à l’administration des départements ioniens .

39Artt. 238 et ss. de la Constitution de 1795.

40 Ricotti, Il costituzionalismo britannico nel Mediterraneo, op. cit., 327.

41V. l’arrêté du 7 novembre 1797 in Correspondance de Napoléon Ier, III, 404; Rodocanachi, Bonaparte et les îles ioniennes, op. cit., 64.

42 Lunzi, Storia delle isole jonie sotto il reggimento, op. cit., 110.

43Rodocanachi, Bonaparte et les îles ioniennes , op. cit., 95.

44 Lunzi, Storia delle isole jonie sotto il reggimento dei repubblicani, op. cit., 138; Rodocanachi, ivi, 94-96.

45 Rodocanachi, ivi, 52.

46 Alfredo Viggiano note que le rapport «tra famiglie eminenti e disponibilità/proprietà privata delle vestigia del santo (…) costituisce uno dei principali strumenti di legittimazione all’interno della Comunità, (…) segna la capacità di una Casa di porsi al centro dei rapporti sociali e di potere sopra un definito territorio» (Lo specchio, op. cit., 114).

47«L’esprit de parti fut sévèrement contenu, les nobles sans être inquiétés, perdirent le droit de vexer le Peuple, quelques exemples de sévérité donnés par le Général Gentili firent cesser les assassinats; la vénalité et la corruption furent réprimées; l’ordre s’établissait dans l’administration; la morale publique se relevait; mais les Français perdirent tout et se perdirent eux-mêmes par des fautes capitales. L’une fut de s’être attiré l’inimitié d'Ali-Pacha dont ils auraient pu aisément à cette époque se faire un ami; l’autre bien plus grave encore fut de changer en haine l’affection du Peuple en choquant sans ménagement ses préjugés religieux. (…) en cherchant les motifs qui excitèrent les habitants à la révolte, on pourrait croire, si l’on ne connaissait pas l’esprit de ce Peuple, que ce furent l’accusation de tyrannie contre les Français et l’attrait d’un gouvernement indépendant qui produisirent cet effet; mais il est certain que ces raisons n’eurent et ne pouvaient avoir aucune influence et que la promesse d’un gouvernement semblable à celui de Raguse, qui devait flatter l’orgueil des nobles, n’eut été propre qu’à alarmer le Peuple s’il avait pu avoir à cette époque une idée aussi nette de ce gouvernement qu’il l’eut dans la suite quand on voulut en effet lui donner un semblable à celui-là; mais les accusations d’athéisme, d’impiété, d’apostasie, auxquelles les Français avaient donné lieu, soutenues par les anathèmes lancées sur eux, et par la bannière de Saint Spiridion que les nobles promenèrent dans les campagnes, voilà quelles furent les véritables causes de la révolte»: Jules Bessières: Six rapports, op. cit., 275.

48 Ricotti, Il costituzionalismo britannico nel Mediterraneo, op. cit., 331. Pour l’analyse du texte, ivi, 331-334. V. aussi E. Lunzi, Della Repubblica Settinsulare, Bologna, 1863.

49Une copie de ce manuscrit (selon les indications de Ricotti, ivi, 334) est conservée aux archives de Naples, Affari Esteri, fascio 2359, fascicolo 11.

50Le nombre des magistrats est visiblement augmenté (40 dans claque île: art. 10 du Piano provvisorio), juges obligés de travailler sans émoluments («Li giudici e Magistrati non avranno stipendio, ma tutti indistintamente si faranno un preggio di servire localmente la patria ad honorem», selon l’article 13) et qui doivent utiliser uniquement la langue grecque (art. 24. «Tutti li Giudizj nelle rispettive Isole si renderanno e faranno in Lingua Greca, onde ogni abitante conosca li suoi affari»). Il s’agit d’un nouveau moment de discontinuité puisque la langue du droit est l’italien. Mais il faut remarquer qu’il s’agit d’une aspiration réalisée seulement vers la moitié du XIX siècle comme l’a noté G. Cozzi, Diritto veneto e lingua italiana nelle isole Jonie nella prima metà dell’Ottocento, à présent in La società veneta e il suo diritto, Venezia, 2000, 357-372.

51 Titolo Secondo, Tribunal Criminale di Prima Istanza, 7: «Motiveranno cadauno de’ Giudici la propria opinione».

52 Titolo Secondo, Tribunal Criminale di Prima Istanza, 5 e 10.

53 Titolo Secondo, Tribunal Criminale di Prima Istanza, 8.

54 Titolo Secondo, Tribunal Criminale di Prima Istanza, 11.

55 Titolo Secondo, Tribunal Criminale di Prima Istanza, 6.

56 V. Cozzi, Repubblica di Venezia, op, cit., 221 e 323. Ce regretté historien écrit: «di per sé, dunque, l’angolazione da cui i giudici erano portati a guardare i casi loro sottoposti era politica. Lo era ancor più, se invece che in una magistratura o in una corte veneziana, si doveva rendere giustizia in qualità di rettori di qualche centro del Dominio veneto, di terra o di mare: le commissioni affidate loro dalla Serenissima Signoria li invitavano bensì ad applicare, laddove ci fossero – e assai spesso non c’era quasi nulla – statuti o consuetudini locali: ma concludevano col dire che infine dovevano tener conto, nonché della loro equità, del bene dei sudditi e di quello indisgiungibile dello Stato veneto» (ivi,p. 324); v. aussi G. Zordan, L’ordinamento giuridico veneziano, II edizione riveduta, Padova, 2005, 174; C. Povolo, Retoriche giudiziarie, dimensioni del penale e prassi processuale nella Repubblica di Venezia: da Lorenzo Priori ai pratici settecenteschi in L’amministrazione della giustizia penale nella Repubblica di Venezia (secoli XVI-XVIII), II, Retoriche, stereotipi, prassi, Vicenza, 2004, 40-41.

57Provvisorio Piano di Governo per le isole ex venete, op. cit., 22.

58 Artt.181-186, ivi.

59Rapporto della Commissione conferente al corpo legislativo sopra la Costituzione dell’anno 1803, in Le tre costituzioni (1800, 1803, 1817) delle sette Isole Ionie ed i relativi documenti con l’aggiunta dei due progetti di costituzione del 1802 e del 1806 e delle modificazioni e riforme fatte alla costituzione del 1817, Corfù, 1893, ed. N. B. Manésis, 39.

60 Artt. 173-180, in Le tre costituzioni, op cit..

61 Ricotti, Il costituzionalismo britannico, op. cit., 352.

62 «Quando il Codice Civile Settinsulare sarà promulgato i giudici motivando addurranno il testo della legge cui appoggia il loro Giudizio. Prima di questo tempo essi adducono la ragione, che li determina o la legge vigente ( Art. 146 della Costituzione), e nel decidere seguono intanto li principj di Giustizia, e le disposizioni delle Leggi Venete e Municipali, che non fossero in opposizione della Costituzione, delle Leggi della Repubblica, e del presente Codice di Procedura Civile» in Le leggi municipali delle Isole Ionie dall’anno 1386, fino alla caduta della Repubblica Veneta raccolte, disposte in ordine cronologico e pubblicate, op. cit., I, 7.

63 Ricotti, Il Costituzionalismo britannico, op. cit., 359.

64Napoléon à Giuseppe Bonaparte, 6 septembre 1807, Correspondance de Napoléon Ier, XVI, 1864, 11. Cfr. Baeyens, op.cit., p. 67; Haegelé, Un pion de taille, op. cit., 30. Sur César Berthier (1765-1819) v. J. Garnier, in Dictionnaire Napoléon, sous la direction de J. Tulard, éd. Paris, 1999, 213.

65«Mon Frère, je reçois votre lettre du 26 septembre avec différentes lettres de Corfou. Je n’ai pas chargé le général César Berthier de déclarer que Corfou faisait partie de l’Empire, et, puisque je m’étais tu, il devait bien aussi se taire. Témoignez-lui mon mécontentement. Il devait déclarer que la Constitution était conservée sur le pied où elle se trouve. Ordonnez-lui d’agir avec plus de circonspection et de prudence (…) Faites-lui comprendre qu’il ne sait pas, que personne ne sait ce qu’il fera demain, et qu’ainsi il doit constamment se maintenir dans un grand système de prudence envers tout le monde. Le général César Berthier a eu très grand tort d’arborer le drapeau français. Il oublie dans ses lettres les choses les plus importantes, telles que le nombre des troupes russes qui se trouvent à Corfou»: Napoléon à Joseph Bonaparte, 6 octobre 1807, in Correspondance de Napoléon, op. cit., XVI, 70.

66Napoléon au général Clarke, ministre de la Guerre, 12 octobre 1807: «Monsieur le Général Clarke, présentez-moi un projet de décret 1° Pour nommer un gouverneur général des îles Ioniennes, qui sera investi directement de toute l'autorité militaire et supérieurement de l'autorité civile et diplomatique; 2° Pour nommer le sieur Bessières, consul général à Venise, mon commissaire près le sénat des Sept Iles. (…) Le gouverneur général correspondra exactement avec le ministre de la guerre. Mon commissaire correspondra avec mes ministres pour toutes les affaires civiles, de finances, de législation, etc. (…). Vous mettrez dans le décret que le gouvernement des Sept Iles sera tout entier dans les mains de la guerre, comme les colonies sont dans celles du ministre de la marine. Du reste, mon intention est qu'il ne soit rien innové à l'administration intérieure du pays, et qu'elle soit maintenue dans sa plus grande franchise, jusqu'à ce que j'aie donné de nouveaux ordres. Mûrissez bien ce projet, et conférez-en en détail avec le ministre de la marine»: Correspondance de Napoléon, op. cit., XVI, 81.

67G. Levy, De la condition internationale des Iles Ioniennes, Paris, 1901, 34; Rodocanachi, Bonaparte et lesîles ioniennes, op. cit., 207 e 208.

68V. retro.

69Sur Géraud-Pierre-Henri-Julien Bessières (1777-1840) v. J. TulardDictionnaire Napoléon, op. cit., 219.

70Six rapports, op. cit., 297.

71François Xavier Donzelot (1764-1843) est nommé Gouverneur le 28 mars 1808 v. J. Tulard, Dictionnaire Napoléon, op. cit., 658. (cfr. Correspondance, op. cit., XVI, 284) ; Baeyens, op. cit, 83 et ss.

72Six rapports, op. cit., 298.

73«A l’arrivée du Commissaire impérial, les prisons regorgeaient de malheureuses victimes du Prostichio, à la suite de deux mauvaises récoltes qui mettaient les débiteurs hors d’état de s’acquitter envers leurs avides créanciers. Un seul noble, qui s’est fait dans les Sept Iles une effroyable réputation par l’excès de ses usures et de ses cruautés, retenait plus de 60 pères de famille dans des cachots infects. Le commissaire impérial après avoir fait examiner par une commission, les justes réclamations de ces malheureux, provoqua un décret du Sénat qui les mit en liberté et leur accorda des délais pour effectuer leurs payemens. En même tems il fit rendre au Sénat un autre décret qui adoucissait l’horreur du Prostichio. Mais il fallut transiger avec l’habitude et ne pas détruire entièrement un usage immoral et funeste introduit par la cupidité des Provéditeurs, maintenu par l’avarice des nobles et par la stupide imprévoyance des habitans de la campagne»: Six Rapports, op. cit., 317. Sur le contrat de prostichion v. M. Michelon, “La peste dei prosticci”. Travagli legislativi di un contratto agrario nelle isole ionie (sec. XVI-XIX), Atti dell’Istituto veneto di scienze, lettere ed arti, CL (1991-92), 5-38; S. Asdrachas, Rendita feudale e rendita fondiaria a Corfù all’epoca della dominazione veneziana, in Levante veneziano. Aspetti di storia delle Isole Ionie al tempo della Serenissima, a cura di M. Costantini e A. Nikiforou, Roma, 1996, 35-36.

74Le Sénat ionien est conservé mais il est dépourvu d’un réel pouvoir décisionnel.

75«Je ne puis assez dire combien il était nécessaire et urgent de prendre une mesure à cet égard. Chaque jour j’étais accablé d’une foule de pétitions, de réclamations qui toutes me dévoilaient les vices énormes du système judiciaire établi dans ce pays; chaque jour des familles entières, des députations des communes venaient me demander avec des larmes et des cris un remède à des maux qu’on ne pouvait faire cesser qu’en remontant à la source. Je voyais les personnes les plus désintéressées, les jurisconsultes les plus éclairés, le Sénat, et toutes les classes de la société se réunir dans les mêmes opinions, dans les mêmes sentiments; il eut été difficile de résister à ce concert de tous les esprits, de toutes les âmes, et je sentais qu’en y cédant je ferais la chose la plus agréable et la plus utile à ce pays»: Bessières à Regnier, 21 mai 1808, AN, Paris, BB 5 295.

76«(…) cette forme d’élection qu’on pourrait trouver bonne elle-même, était la plus mauvaise qu’on peut imaginer dans un pays livré depuis des siècles aux dissensions de quelques familles les plus puissantes qui se divisent en autant de factions, et où la perversité des mœurs égale la fureur des parties; les juges nommés tour à tour par les chefs de ces différentes parties n’étaient que les instruments de leurs passions, et il s’établissait entre les uns et les autres une confédération en vertu de laquelle ceux-ci et leurs partisans triomphaient toujours devant les tribunaux, et ceux-là n’étaient jamais punis de leur prévarication»: ibidem.

77«Le droit de rendre la justice n’était que le droit de la vendre, cette vente se faisait presque aussi publiquement que toute autre. Tout le monde savait du moins qu’on ne pouvait aborder les juges qu’avec des présents, qu’il en fallait encore pour le Chef du parti dominant dont ils étaient les créatures et les instruments et ceux qui n’avaient pas la faculté d’en faire, devaient se dévouer, c'est-à-dire livrer à défaut d’argent, leurs bras et leurs consciences à l’une de ces familles puissantes qui avaient dirigé les élections, et qui dirigeoient les jugements»: ibidem.

78«L’extrême négligence des juges était un autre abus non moins funeste que leur corruption et produit par la même cause ces hommes n’étant point payés par le gouvernement ne se croyaient pas tenus à une grande assiduité, ils se dispensaient fréquemment de leurs obligations envers le public en alléguant le soin de leurs affaires particulières. Il était difficile de les réunir en nombre suffisant. Leur absence, sous les plus légers prétextes, forçait sans cesse d’ajourner les causes, les affaires s’accumulaient, et traînaient en longueurs, les plus simples duraient des années entières, beaucoup n’étaient expédiées qu’au bout de 15 à 20 ans, et l’avidité des juges concourait avec leur paresse à produire ces délais interminables qui entrainoient la ruine des deux parties. (…) Assigner un traitement aux juges était donc le seul moyen de s’assurer à la fois de leur zèle et de leur intégrité, en joignant à cette garantie celle du caractère et des mœurs des personnes qu’on élevait à ces places, il eût été à désirer qu’on eut pu leur donner des appointements plus considérables, mais on crut devoir se renfermer dans les limites fixées par le budget, on pourra dans la suite améliorer leur sort»: ibidem.

79«Les loix criminelles sont les mêmes qui ont été données dans les siècles de la plus grossière ignorance; on y voit encore que pour un délit on arrachera les yeux, ou la langue à un homme que pour tel autre, on lui coupera les oreilles, le nez, la main; tout le reste est de cette barbarie»: ibidem. Pour ce qui concerne les lois criminelles de Vénise v. A. Sabini, Leggi criminali del serenissimo dominio veneto. In un solo volume raccolte e per pubblico decreto ristampate, Venezia, 1751 (réimpression E. Della Giovanna e A. Sorgato, Venezia, 1980). V. Zordan, L’ordinamento giuridicoveneziano, op. cit., 204.

80«La législation civile est un composé de loix romaines, de loix vénitiennes de loix particulières au pays, ou plutôt une horrible confusion de toutes ces loix, accrues encore par un mélange hétérogène de coutumes qu’on a laissé introduire dans les différentes îles; non seulement on n’a jamais cherché à les concilier en les ordonnant entre elles dans un même Code, mais on n’a pas songé encore à les réunir physiquement dans un recueil qui aurait du moins l’avantage d’en faire mieux sentir le besoin d’une réforme. Il est aisé de voir combien cet Etat de la législation tendait encore à favoriser la corruption des juges comme il tend à multiplier, à prolonger les procès; pourquoi il arrive si rarement dans ce pays que deux tribunaux prononcent de la même manière sur la même affaire» (ibidem).

81Ibidem.

82Ibidem.

83Ministre de la Justice au ministre de la Guerre, 23 janvier 1809, AN, Paris, BB 5 295.

84Ibidem.

85Ibidem.

86«Il est dit dans un endroit que si la partie citée ne comparaît pas le juge lancera un mandat d’arrêt contre elle, et que si huit jours se passent encore sans qu’elle ait comparu le juge signe la sentence par défaut. La personne citée qui ne comparait point en France n’encourt d’autre peine que d’être condamnée par défaut (…) on n’est point exposé en matière civile à être traduit par force en justice et la règle introduite dans les îles ioniennes a non seulement l’inconvénient d’être totalement hors de nos mœurs, mais celui d’être inutile, puisque en cas de non comparution ou de non arrestation dans la huitaine tout se termine comme en France par une sentence de défaut»: ibidem.

87Ibidem. 44. «Le spese di processo sono pagate da quello che venisse giudicato dal Tribunale, e sono determinate con la scorta della tariffa nella stessa sentenza./Non è accettata appellazione della sentenza senza che vi precedi il deposito delle spese dalla sentenza importate»: Organizzazione dei Tribunali di Giustizia e Procedura civile e criminale delle sette isole greche dell’Ionio, op.cit.

88Ibidem.

89 V. retro 3.

90 47.«Nelle allegazioni e nei giudizi Criminali sono osservate le disposizioni degli Articoli 78 79 della procedura Civile e sono sempre presenti accusatori e accusati. L'accusator pubblico parla sempre l'ultimo ed emmette le sue conclusioni vocali nelle quali deve indicare al Tribunale la legge applicabile al caso».

91 19.«Ove sia liquidato il prevenuto ed i complici se ve ne fossero il Tribunal segna l'atto in cui ordina il loro arresto lorchè non sia stato eseguito prima e commette loro di difendersi. L'atto deve ennunciare le circostanze del fatto di cui sono accusati ed in esso secondo la qualità del caso è fissato il termine della difesa che non può essere maggiore di dieci giorni da contarsi dal momento della consegna delle copie del processo».

92 79.«I giudicj saranno resi a pluralità di voci, pronunciati subito dopo la discussione, e motivati».

93 11.«L'accusatore pubblico è il Ministro per mezzo del quale la giustizia Criminale liquida il colpevole e lo punisce, quindi il Tribunal li dà subito significazione di ogni avvenimento».

13. «Il Tribunale procede alla liquidazione del fatto e dei colpevoli tanto sopra reclami particolari, come sopra informazioni dell'accusator pubblico. La procedura è istruita e diretta dall'Accusatore, responsabile di qualunque diffetto e di ogni ommissione».

16. «Se le prove o indizj ritratti non persuadono il Tribunale d'ordinare l'arresto è proseguita la procedura fino al suo compimento».

17. «Lorchè il prevenuto è arrestato in qualunque stato di procedura è subito esaminato nel fatto di cui è accusato».

94 28. «L'Accusator pubblico sia in contraddittorio, sia in assenza del prevenuto per non essersi presentato o per non averlo potuto arrestare deve sostenere l'accusa. Sono ascoltate le allegazioni degli offesi e dei prevenuti volendole fare. Terminata la discussione l'Accusatore pubblico e gli altri difensori si ritirano, ed il tribunale sentenzia».

95 24. Il Tribunale potrà sempre che lo creda fare qualunque confronto fra i testimonj dell'accusa, e della difesa ed anche fra testimonio e prevenuto, ed essumere in qualunque stato di procedura nuove prove per liquidare la colpa o l'inocenza, unico oggetto essendo della giustizia di rilevare la verità affinché il reo non si nasconda o l'innocente perisca.

96 V. E. Dezza, Il nemico della verità. Divieto di difesa tecnica e giudice factotum nella codificazione penale asburgica (1768-1873), in Riti, tecniche, interessi. Il processo penale tra Otto e Novecento, Atti del Convegno (Foggia, 5-6 maggio 2006), a cura di M. N. Miletti, Milano, 2006, 13 et ss.

97Art. 276. «En vertu du pouvoir discrétionnaire dont il est investi, il peut prendre sur lui tout ce qu’il croit utile pour découvrir la vérité; et la loi charge son honneur et sa conscience d’employer tous ses efforts pour en favoriser la manifestation»: Code des délits et des peines, Paris, an IV. Sur le contenu de ce code v. E. Dezza, Il Codice di procedura penale del regno italico (1807). Storia di un decennio di elaborazione legislativa, Padova, 1983, 32-34.

98 Art. 484. «Il presidente di ogni tribunale o corte, oltre alle funzioni di giudice e alle obbligazioni di sopra specificate, è rivestito del potere che si chiama di discrezione: in virtù di esso ei può fare di sua autorità tutto ciò che gli sembri conducente a scoprire la verità./ La legge ne incarica il suo onore e la sua coscienza»: Codice di procedura penale, Milano, 1807 in Le fonti del codice di procedura penale del Regno italico, a cura di E. Dezza, Milano, 1985, 249.

99 Dezza, Il nemico della verità. Divieto di difesa tecnica e giudice factotum nella codificazione penale asburgica (1768-1873), op.cit., 69.

100 V. A. Padoa-Schioppa, La giuria penale a Malta (1811-1854), in Leggi criminali per l’isola di Malta e sue dipendenze (1854), Ristampa anastatica con scritti di A. Cadoppi, C. Carcereri de Prati. M.A. Cattaneo, F. Colao, M. Da Passano, E. Dezza, G. Di Renzo Villata, R.F. Ellero, E. Fortuna, A. Ganado, G. Garbagnati, L. Garlati Giugni, R. Isotton, L. Luparia, D. Novarese, A. Padoa Schioppa, P. Pittaro, S. Vinciguerra, raccolti da S. Vinciguerra, Padova, 2003, CCCLI-CCCLXIV; et E. Dezza, «… Felicemente disposano le tradizioni della scuola italiana alle libertà inglesi». I caratteri generali delle Leggi di Procedura Criminale di Malta del 1854, in Leggi criminali per l’isola di Malta, op. cit., CCCXXIV-CCCXXVII.

101Pour ce qui concerne les raisons qui amenèrent les Britanniques à ne pas introduire le jury dans les îles ioniennes v. Ricotti, Il Costituzionalismo, op. cit., 393.

102 Ainsi G. Chiodi, Le relazioni pericolose. Lorenzo Priori, il senatore invisibile e gli eccelsi Consigli veneziani, in L’amministrazione della giustizia penale nella Repubblica di Venezia (secoli XVI-XVIII). I. Lorenzo Priori e la sua Prattica Criminale, Verona, 2004, LXXI. V. L. Priori, Prattica criminale, ivi, 85.

103 Artt. 119-125, Codice di procedura penale per gli Stati Uniti delle Isole Jonie, Corfù, 1844.

104 51, Organizzazione dei Tribunali di Giustizia e Procedura civile e criminale delle sette isole greche dell’Ionio, op. cit.

105 V. retro.

106La collation avec les Leggi penali di Giuseppe Bonaparte per il Regno di Napoli del 1808 n’a pas produit les effets espérés: elle fait apparaître des élément communs qui dépendent vraisemblablement de la même source ‘milanaise’. Cfr. Le leggi penali di Giuseppe Bonaparte per il Regno di Napoli (1808), in Casi, Fonti e studi per il diritto penale raccolti da S. Vinciguerra, Serie II, Le Fonti, Padova, 1998. V. E. Dezza, Il procedimento criminale nelle leggi napoletane del 1808. Prime note, ivi, CCCXXXV-CCCLXIII; F. Mastroberti, Codificazione e giustizia penale nelle Sicilie dal 1808 al 1820, Napoli, 2001, 66-133.

107Six rapports, cit., 301.

108Ivi, 314.

109Ivi, 313.

110Le ministre de la Guerre au ministre de la Justice, 9 janvier 1809, AN, BB 5 295.

111 Sur la destitution de Bessières v. Haegele’, Un pion de taille, op. cit., 34.

112Sur Mathieu-Maximilien-Prosper comte de Lesseps (1774-1832) v. A. Faivre d’Arcier, Dictionnaire Napoléon, op.cit., 196.

113Lesseps à Donzelot, 28 août 1810, AN BB 30 179.

114Donzelot au ministre de la guerre, Corfou le 29 août 1810 , AN BB 30 179.

115AN, AF IV 1717, B, d. 2. Cfr. Bayens, op. cit, 106.

116Rapport de M. le président du Sénat Teotochi et M. le Senateur Metaxa sur le code napoléon à introduire dans les iles Ioniennes, Corfou le 10 avril 1810, AN BB 30 179.

117Regnier au ministre de la Guerre, 13 mai 1811, AN BB 30 179.

118« … Le seul remède efficace qu’il convient d’y porter ne pouvant être que le résultat d’une réforme générale dans le système judiciaire de ces isles et même d’une substitution du code civil français aux Loix informes et barbares qui les régissent encore »: Lesseps au Gouverneur Donzelot, , 1er juin 1812, AN BB 5 295.

119 V. à ce sujet L. Bressan, Il divorzio nelle Chiese Orientali. Ricerca storica sull’atteggiamento cattolico, Bologna, 1976, 232-249. Il faut remarquer que dans le Codice civile per gli Stati Uniti delle Isole Ionie (1841) l’article 201 établit que «qualunque sia la natura dei fatti, che daranno luogo domandare il divorzio per cause canoniche, questa domanda dovrà essere proposta innanzi la Curia Ecclesiastica dell’Isola, in cui i conjugi avranno il loro domicilio, e verrà giudicata nelle forme ordinarie». Le tribunal ecclésiastique est obligé de transmettre la sentence au tribunal civil qui doit régir les effets civils du divorce (artt. 208-215).

120En réalité, Lesseps a voulu faire connaître immédiatement le fait survenu: «Votre excellence sait que, par le Décret de sa Majesté en date du 10 novembre 1807 l’organisation du gouvernement des Iles Ioniennes et la constitution de l’administration intérieures de ces isles sont maintenues, et que les Cours et Tribunaux doivent continuer à y rendre la justice en matière civile, criminelle et correctionnelle conformément aux Loix du pays. Le mariage n’étant ici considéré que comme lien religieux, sa dissolution ne peut être prononcé que par un tribunal ecclésiastique présidé par l’archevêque grec; les tribunaux civils n’interviennent qu’après la séparation des époux et pour cause de la défense de leurs mutuels intérêts. Tous les actes qui précèdent la prononciation du divorce devant, aux termes de l’article 307 du Code Napoléon, cité par Mr Loque, être suivis et jugés de la même manière que toute autre action civile; mais les tribunaux existants dans les Isles Ioniennes étant encore incompétents pour ces sortes d’actions, à qui doivent recourir les sujets français, soumis aux dispositions du dit Code?» (Lesseps à Regnier, 15 mars 1812, AN BB 5 295). La question n’est pas facile à résoudre puisque Loque ne fait pas partie de l’armée (autrement le divorce devenait de la compétence de l’Inspecteur aux armées). Un problème qui ne se pose pas pour les sujets du royaume napoléonien de Naples parce qu’ils peuvent s’adresser au consulat.

121La douche froide arrive un an après, le 31 mai 1813. Pour le surabondant courrier que nous ne pouvons pas reproduire ici, AN, BB 5 295.

122Pour le Code Romagnosi et les Leggi napoletane v. les notes 98, 99 et 107.

123Pour une analyse des Statuti veneti dans le code civil de 1841 v. S. Flogaïtis, Système vénitien de successions ab intestat et structures familiales dans les îles ioniennes, Genève, Paris, 1981.

124Certes, on retrouve des dispositions qui sont en contraste avec le code Code civil. Bornons nous à un seul exemple. Le législateur ionien admet l’application, dans certaines conditions, du droit municipal et du droit vénitien: v. art. 9 Codice civile de 1841 et les modifications introduites par le Parlement ionien en 1842, art. 2: v. Cozzi, Diritto veneto e lingua italiana, op. cit., 357-372.

125V. retro les travaux cités à la note § et très récemment S. Soleil, “Ces sages lois que les autres peuples s’empressent à l’envie d’adopter…”. Le recours à l’étranger dans la formation du concept de “modèle juridique français”, in Revue historique de droit français et étranger, 86 (2), (2008), 225-244.

Date added March 3, 2011
© 2011 fhi
ISSN: 1860-5605
First publication
March 3, 2011

  • citation suggestion Stefano Solimano, Bonaparte et les îles Ioniennes. Francisation juridique en difficulté. Notes pour un approfondissement (March 3, 2011), in forum historiae iuris, https://forhistiur.net2011-03-solimano